Aujourd’hui je vais vous présenter l’œuvre la plus connue de Victor Hugo : son roman Les Misérables. Dans ce cours vous allez en découvrir l’histoire, les personnages, les scènes clés, et les grands thèmes. On ne parlera dans cet épisode que de la première partie du roman, Fantine, la suite de l’histoire (quatre parties supplémentaires) étant moins connue et moins étudiée. Ce sera sans doute l’objet d’un autre cours. Vous apprendrez aussi dans ce cours plusieurs expressions françaises courantes et un peu de vocabulaire.
Si tu préfères aborder le cours sous forme de vidéo / podcast, le voici :
Les Misérables, une histoire triste sur la pauvreté
Tout commence avec l’arrivée d’un forçat (un prisonnier du bagne au XIXe siècle) dans un village. Tout le monde le rejette, l’aubergiste refuse de lui louer une chambre et de lui vendre un repas, parce que sur son papier d’identité il est inscrit qu’il a fait 19 ans de bagne (une prison dans laquelle les prisonniers devaient faire des travaux forcés, comme construire des routes). C’est la double peine : non seulement il a été emprisonné pour avoir volé un pain parce qu’il avait faim (Hugo pensait en effet que c’est la pauvreté qui entraine la délinquance), mais en plus il ne peut plus mener une vie normale. L’aubergiste refuse en effet de l’accueillir alors que Jean Valjean (le forçat) peut le payer !
Rejeté de tous, Jean Valjean (le héros de cette histoire) s’apprête à dormir dehors quand quelqu’un lui suggère de toquer à la porte de Monseigneur Myriel, l’évêque de Dignes (un évêque est un religieux haut placé dans le clergé). Avant l’arrivée du personnage de Jean Valjean dans les Misérables, Victor Hugo (qui était très chrétien) brosse un long portrait de ce religieux qui vivait très modestement (contrairement à beaucoup de ses collègues hommes d’Eglise) et donnait l’essentiel de son argent aux pauvres. Monseigneur Myriel est le seul qui ne rejette pas Jean Valjean, qui l’accueille gentiment chez lui, en lui offrant un dîner et un bon lit. Jean Valjean est troublé par cette gentillesse, mais il n’arrive pas encore à intégrer qu’il puisse y avoir des gens justes, tant il a toujours été victime d’injustice. On apprend d’ailleurs à ce moment-là que s’il a fait 19 ans de bagne, c’est parce qu’il a tenté plusieurs fois de s’échapper : au départ, il avait été condamné à 5 ans d’emprisonnement pour avoir volé un peu de nourriture et les 14 autres années de bagne se sont ajoutées suite à ses tentatives d’évasion. A cette époque, la première moitié du XIXe siècle, les lois étaient beaucoup plus dures qu’aujourd’hui !
Monseigneur Myriel, un exemple de bonté
La seule richesse de Monseigneur Myriel consiste en un peu d’argenterie (des couverts en argent massif) et deux chandeliers en argent également. C’est trop tentant pour Jean Valjean qui voit là un moyen de pouvoir acheter à manger sans voler, en revendant ces objets… Il s’empare donc des couverts pendant la nuit, avant de s’échapper au petit matin, alors que Monseigneur Myriel, sa sœur et sa servante dorment encore. Malheureusement pour lui, il est attrapé par les gendarmes, qui le fouillent, trouvent l’argenterie, et le ramènent chez Monseigneur Myriel pour vérifier le vol. Et là, coup de théâtre : le gentil monsieur Myriel ment aux gendarmes en disant qu’il a donné cette argenterie à Jean Valjean, et il lui offre même ses précieux chandeliers ! Le vieil homme, astucieux, dit alors à celui qui l’avait volé : « Vous appartenez au Bien désormais ». Ce religieux charitable reste ainsi fidèle à lui-même : il donne l’exemple en offrant ce qu’il a de plus précieux, afin d’aider le pauvre Jean Valjean à sortir de la misère et à devenir honnête. C’est un acte très fort, très moral, qui va être couronné de succès puisque Jean Valjean va complètement changer après ça, et devenir à son tour un homme bon et généreux.
Victor Hugo, un auteur qui défend la justice sociale
Dans cet épisode essentiel des Misérables se concentre la vision sociale et politique de Victor Hugo qui, après une jeunesse royaliste, était devenu un homme de gauche, défenseur fervent de la République et de la justice sociale, c’est-à-dire d’une volonté d’aider les pauvres plutôt que de les punir. Pour Victor Hugo, il valait mieux en effet donner aux pauvres la possibilité d’être éduqués (à l’école) et de trouver du travail plutôt que de les mettre en prison quand ils volaient de quoi se nourrir.
L’épisode du jeune Savoyard
Mais revenons à Jean Valjean. Il quitte la ville de Dignes et s’en va sur les chemins, avec assez d’argent grâce à la vente de l’argenterie de Monseigneur Myriel. A un moment donné, il s’arrête dans la campagne pour casser la croûte (expression qui signifie manger un peu de pain, car il fallait casser la croûte épaisse du pain, la baguette n’existant pas encore. A cette époque, il n’y avait que ce qu’on appelle aujourd’hui des pains de campagne).
C’est alors qu’arrive un jeune garçon de 10 ans, un petit Savoyard (originaire de la région de la Savoie), qui s’amuse avec une pièce de 40 sous gagnée grâce à son métier de ramoneur (un ramoneur est quelqu’un qui nettoie les conduits de cheminée). Hé oui, à cette époque (XIXe siècle), les enfants travaillaient au lieu d’aller à l’école (sauf les enfants des riches) !
Le jeune garçon, prénommé Petit-Gervais, s’amuse à lancer et à rattraper sa pièce, qui malheureusement lui échappe et atterrit aux pieds de Jean Valjean. Mais celui-ci ne la voit pas. Petit-Gervais, lui, a bien vu où était la pièce et demande à l’ancien bagnard de la lui rendre. Jean Valjean ne comprend pas, s’agace, et chasse l’enfant. Quelques minutes plus tard, Jean Valjean découvre enfin la pièce à ses pieds et veut la rendre à Petit-Gervais, mais celui-ci s’est enfui, effrayé par les manières rustiques de celui qui a passé 19 ans à se faire maltraiter au bagne.
Le bagne et la prison, un thème cher à Victor Hugo
Je fais une pause dans l’histoire pour signaler que c’est là un autre thème cher à Victor Hugo : la prison. Victor Hugo a écrit deux romans sur la prison et la peine de mort : Claude Gueux et Le Dernier jour d’un condamné. Dans ces deux romans, Victor Hugo dénonce les conditions de détention et l’horreur vécue par les prisonniers. Pour l’auteur des Misérables, la prison n’était pas une réponse adaptée aux délits commis par les pauvres gens, qui finissaient en prison pour avoir juste essayé de survivre en volant à manger (c’est le cas de Jean Valjean mais aussi du héros de Claude Gueux). Dans les Misérables, on voit bien que la prison / le bagne a fortement abimé Jean Valjean, qu’il se comporte de manière sauvage, brutale, sans convivialité, parce qu’il a passé la moitié de sa vie à se faire traiter comme un chien et qu’il n’arrive plus à avoir confiance en qui que ce soit. Il est comme un animal blessé, qui évite les rapports humains par peur de se faire blesser à nouveau, et se montre agressif pour se protéger d’éventuelles attaques.
Jean Valjean risque le bagne à perpétuité
Mais revenons à nos moutons (expression qui signifie : reprenons là où nous nous étions arrêtés dans l’histoire / l’argumentation). Jean Valjean a donc découvert la pièce de Petit-Gervais et veut la lui rendre (car il n’en a pas besoin puisqu’il a vendu les couverts en argent de Monseigneur Myriel et qu’en plus « il appartient désormais au camp du Bien »). Il cherche le garçon dans la campagne, en vain (sans succès). Hélas pour lui, le jeune ramoneur est allé se plaindre auprès des gendarmes et a donné son signalement. Désormais, Jean Valjean est considéré comme un récidiviste, puisque c’est la seconde fois qu’il est accusé de vol (et jugé coupable même s’il n’y a pas eu de procès). Or, au XIXe siècle, on ne rigolait pas avec le vol : en tant que récidiviste, Jean Valjean encourt cette fois le bagne à vie ! Il n’en sortira jamais s’il se fait attraper par les gendarmes. Gros suspense : comment l’ancien forçat va-t-il se sortir de ce mauvais pas ?
Victor Hugo ne nous le révèle pas tout de suite, en bon romancier qui sait mettre le lecteur en haleine (lui donner envie de savoir la suite). Il fait d’abord un détour par Fantine, personnage très important du roman puisqu’elle est la mère de Cosette, cette pauvre petite fille maltraitée que Jean Valjean prendra plus tard sous son aile (c’est-à-dire sous sa protection). Mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs (expression qui signifie : ne faisons pas ou ne racontons pas les choses dans le désordre).
Fantine, victime de l’amour
Fantine est une jeune femme qui vit à Paris avec ses trois amies. Elle est belle, naïve, ouvrière et pauvre. Les quatre jeunes femmes ont des amants, c’est-à-dire qu’elles ont une relation amoureuse avec des hommes jeunes (étudiants) mais ne sont pas mariées avec eux, ce qui à l’époque était très mal vu. Les étudiants sont sans scrupules (sans moralité) : ils annoncent à la fin d’une soirée qu’ils repartent en province (c’est-à-dire loin de Paris) pour trouver un métier et se marier, sans aucun égard pour leurs amoureuses parisiennes, qui préfèrent en rire. Malheureusement pour Fantine, son histoire d’amour avec Tholomyès s’est rapidement soldée par une grossesse (elle est enceinte).
La voilà donc fille-mère, une expression du XIX e siècle qui signifie qu’elle a eu un enfant sans être mariée. C’est dur à croire, mais à cette époque, c’était un véritable déshonneur ! Les femmes qui avaient des relations avec des hommes sans être mariées avec eux étaient considérées comme des moins que rien, parce que la vertu (le fait de ne pas avoir de relations sexuelles en dehors du mariage) était une valeur très forte, en lien avec la religion chrétienne qui était encore très puissante dans la société. Donc, à cette époque, les gens considéraient que les femmes qui avaient un enfant sans être mariées n’avaient pas su préserver leur vertu, elles s’étaient laissées aller à leurs désirs amoureux, et la plupart les méprisaient pour cette raison. C’était le XIXe siècle, les mentalités, encore fortement influencées par la religion chrétienne, étaient très différentes de celles d’aujourd’hui !
Cosette est confiée aux Thénardier
Voilà donc Fantine enceinte et désespérée. Elle donne naissance à une fillette (une petite fille) qu’elle prénomme Cosette, et s’occupe d’elle pendant environ un an, en vivotant (c’est-à-dire en vivant très pauvrement). Elle l’aime de tout son cœur, mais elle est pauvre, et elle doit donc travailler. Fantine décide de quitter Paris où elle a vécu tant de mésaventures (des aventures malheureuses) pour retourner dans sa ville natale, Montreuil sur Mer, où elle espère trouver du travail. Elle a beaucoup de chemin à faire à pied.
Elle arrive à Montfermeil et fait une halte (une pause durant son voyage) chez des aubergistes (des gens qui tiennent une auberge, une sorte d’hôtel restaurant très rustique). Ils ont l’air gentils, et ils ont deux petites filles à peu près du même âge que Cosette. Les trois fillettes jouent ensemble. Fantine est attendrie et croit que c’est de bonne augure (un signe de chance à venir).
Comme elle ne pourra pas s’occuper de Cosette quand elle aura trouvé du travail (les nourrices étaient réservées aux gens riches, et les crèches n’existaient pas à cette époque, ni l’école pour les pauvres), Fantine décide de confier sa fille aux aubergistes, qui s’appellent les Thénardier. Elle leur versera de l’argent tous les mois pour qu’ils s’occupent bien de la petite. Fantine pense que ce sera bien pour sa fille, qui aura deux amies (les enfants des Thénardier) et mangera à sa faim. Le marché est conclu. Fantine ne sait pas qu’elle vient de laisser sa fille chez des malfaisants (des personnes qui font du mal aux autres) … Une fois de plus, elle s’est montrée très naïve…
Jean Valjean est devenu monsieur Madeleine
Entre temps, Jean Valjean a parcouru bien du chemin (expression imagée qui signifie qu’il a vécu beaucoup de choses et a bien évolué). Il s’est installé à Montreuil sur Mer, a changé d’identité pour ne pas se faire prendre par les gendarmes (souvenez-vous : il encourt le bagne à perpétuité à cause de la pièce perdue du jeune Savoyard). Il se fait désormais appeler Monsieur Madeleine, ou plus exactement le père Madeleine. Il est aussi devenu riche grâce à son ingéniosité (c’est-à-dire sa capacité à trouver de bonnes solutions) : en modifiant quelques procédés et matières premières pour fabriquer la verroterie (des bijoux et bibelots de peu de valeur) produite par l’usine de Montreuil sur Mer, il a permis de rentabiliser fortement cette production. Il a fait construire une usine plus moderne et est devenu très riche grâce à son idée. La petite ville est devenue très prospère (riche) grâce à lui. Comme en plus il se montre généreux envers tout le monde et qu’il a sauvé les enfants d’un gendarme pendant un incendie, il est apprécié de toute la bourgade (petite ville). Il a une cinquantaine d’année et on est au début du XIXe siècle (vers 1820).
Il se trouve que c’est justement dans l’usine de Monsieur Madeleine que travaille désormais Fantine (souvenez-vous : quand elle a confié Cosette aux Thénardier, Fantine était en chemin pour Montreuil sur Mer, sa ville natale, dont Jean Valjean alias Monsieur Madeleine est le nouveau maire).
Les mésaventures de Fantine et Cosette
Fantine reçoit régulièrement des lettres des Thénardier, qui lui donnent des nouvelles de sa fille. Mais, étrangement, les nouvelles sont rarement bonnes : la petite a été malade et il fallu payer le docteur et les médicaments, ou bien elle a un féroce appétit et il faut donner plus d’argent pour la nourrir, ou encore elle a grandi et il faut lui acheter des vêtements… Bref, les Thénardier réclament toujours plus d’argent, alors qu’ils utilisent la pauvre Cosette comme leur servante, la nourrissent à peine, l’habillent de haillons (des vêtements en très mauvais état), la frappent et ne la respectent jamais. Mais tout cela, Fantine l’ignore ! Elle donne presque tout son argent aux Thénardier.
Un jour, une commère (une femme médisante qui se mêle des affaires des autres) espionne Fantine, dont la beauté attise (provoque) la jalousie des autres femmes, et dont le célibat semble suspect. Elle découvre l’existence des lettres et l’adresse des Thénardier. Elle se rend à Montfermeil pour en avoir le cœur net, constate le marché passé entre Fantine et les Thénardier, et obtient une confirmation de ses soupçons : Fantine est bien une fille-mère, sans honneur ! Aussitôt la mégère (femme méchante) s’empresse de le rapporter à la cheffe de l’atelier d’usine où travaille Fantine, et celle-ci est renvoyée en raison de ses mœurs trop légères (son statut de fille-mère). Bien sûr monsieur Madeleine n’est pas au courant.
Malgré ce nouveau coup du sort (ce nouveau malheur), Fantine ne se décourage pas et coud des chemises pour les soldats, en travaillant 18 heures par jour, ce qui lui rapporte à peine de quoi manger et envoyer un peu d’argent aux Thénardier. Elle ne peut plus se chauffer, n’a plus de meubles, ni même de quoi s’offrir des bougies pour s’éclairer. De leur côté, les Thénardier ne cessent pas de lui réclamer de l’argent, en augmentant sans cesse le prix de la pension pour la pauvre petite Cosette, qui ne profite toujours pas des sacrifices de sa mère et souffre elle aussi de maltraitance et de misère.
Misère et déchéance d’une pauvre femme
C’est un tableau sordide de la grande pauvreté que nous présente Hugo, en la montrant sous son angle le plus misérable (d’où le titre du roman), en soulignant les efforts immenses que doivent faire les pauvres pour survivre en restant honnêtes. Les Thénardier sont à l’opposé de Fantine : ils n’hésitent pas à se montrer malhonnêtes (en mentant à Fantine) et à profiter de la naïveté d’une jeune femme pour s’enrichir à ses dépens (c’est-à-dire en lui faisant vivre une expérience difficile). Mais le grand écrivain ne va pas s’arrêter là et la déchéance (la chute vers une situation de plus en plus pitoyable) de Fantine va se poursuivre. Elle ne peut même pas aller voir sa fille car elle n’a pas les moyens de se payer le voyage.
Pour payer les sommes toujours plus importantes que lui réclament les Thénardier, Fantine finit par vendre ses beaux cheveux longs et blonds qui faisaient en partie sa beauté, puis ses dents de devant. Elle n’a plus rien, pas même son attrait (sa séduction) physique, et son salaire minable de couturière baisse encore, ce qui fait qu’elle n’a plus assez pour survivre malgré ses 18 heures de travail par jour. En plus, elle est malade depuis des mois, elle tousse sans arrêt. Alors elle tombe encore plus bas, perd la seule chose précieuse qui lui restait, sa dignité (respect de soi-même), et devient prostituée.
L’inspecteur Javert entre en scène
Pendant ce temps, monsieur Madeleine alias Jean Valjean continue à faire autant de bien qu’il peut autour de lui. Mais il est continuellement observé par l’inspecteur de police Javert, homme rigide, impitoyable et d’une honnêteté scrupuleuse. Il se trouve que Javert a connu Jean Valjean lorsque ce dernier était au bagne, et le policier avait alors été impressionné par la force physique hors du commun (extraordinaire) du forçat. Très observateur, Javert pense bien avoir reconnu Jean Valjean sous les traits (le visage) de monsieur Madeleine, malgré les beaux vêtements et la réussite sociale. Mais le policier n’a aucune preuve et se contente donc de l’épier (le surveiller sans se montrer) sans cesse.
L’accident de Fauchelevent
Un jour, un homme dénommé Fauchelevent a un problème avec sa charrette (il était charretier, c’est-à-dire qu’il transportait des marchandises et des gens dans sa carriole contre de l’argent). Le cheval tombe, le vieil homme chute et se retrouve coincé sous la lourde charrette, au niveau de la poitrine. Le véhicule s’enfonce petit à petit dans la boue et si personne n’intervient, il sera mort dans cinq minutes, broyé sous le poids des marchandises. Javert, présent sur le lieu de l’accident, a demandé à ce qu’on trouve un cric (un outil qui permet de soulever un gros poids par un système mécanique), mais cela prendra trop de temps. N’écoutant que son courage, monsieur Madeleine s’élance et soulève la charrette pendant que d’autres tirent Fauchelevent de ce mauvais pas (de ce danger) et le mettent hors de danger. Tout le monde est estomaqué (très surpris) de la force surhumaine dont vient de faire preuve monsieur Madeleine. Mais Javert, lui, voit ses soupçons confirmés : cette fois, il est sûr qu’un homme aussi fort ne peut être que Jean Valjean.
Cependant, juste après cet incident, monsieur Madeleine est élu maire de Montreuil sur Mer, ce qui lui confère (lui donne) une respectabilité supplémentaire, et fait de lui le chef direct de l’inspecteur Javert, en tant que premier magistrat de la ville (le maire est toujours le premier représentant de justice d’une ville ou d’un village). Javert peut donc encore moins qu’avant pas s’en prendre à lui sans preuves ! Il continue alors à le surveiller sans se faire remarquer.
Fauchelevent, lui, a été blessé lors de l’accident de la charrette, ce qui l’empêche de continuer son métier de charretier. Monsieur Madeleine lui trouve alors un emploi de jardinier à Paris, dans un couvent (un bâtiment religieux où vivent des sœurs, c’est-à-dire des religieuses ayant choisi de dévouer leur existence à la religion chrétienne, ainsi que des jeunes femmes qui y vivent dans les règles de la plus stricte vertu, sans aucun contact avec l’extérieur, ou presque).
Cette anecdote sur Fauchelevent, devenu jardinier dans un couvent, pourrait sembler sans importance. Mais, plus tard dans l’histoire, c’est là que va venir se réfugier Jean Valjean, avec Cosette, pour échapper à Javert. Et Fauchelevent, plein de gratitude (reconnaissance) envers celui qui lui a sauvé la vie, ne pourra pas lui refuser ce service.
Monsieur Madeleine essaye de sauver Fantine
Pendant ce temps, Fantine poursuit sa longue descente aux enfers, sa vie de prostituée ayant perdu tout espoir et toute dignité. Un jour d’hiver où la neige tombait, un jeune homme s’amuse à l’insulter, à se moquer d’elle, tandis qu’elle attendait un client dans la rue. Elle reste indifférente aux injures, mais quand il lui met de la neige glacée dans le dos, Fantine déjà transie de froid devient furieuse, et se met à le frapper pour se défendre de ses attaques. L’homme se débat et l’agresse en retour. Très vite, un attroupement (une petite foule) se forme. Javert intervient et procède à l’arrestation de Fantine, accusée de troubler l’ordre public. Bien sûr elle n’a fait que se défendre contre les attaques d’un jeune bourgeois (un homme assez riche), mais pour Javert, les pauvres sont toujours coupables. Il l’emmène donc en prison et lui annonce qu’elle va y rester pendant six mois, ce qui plonge la jeune femme dans un désespoir encore plus profond car elle ne pourra plus du tout envoyer d’argent aux Thénardier pour nourrir sa fille.
Monsieur Madeleine arrive sur ces entrefaites (à ce moment-là) et demande à Javert de libérer Fantine, qui pourtant vient de lui cracher au visage car elle croit que c’est lui qui a demandé à ce qu’elle soit renvoyée de l’usine. Javert ne peut pas croire qu’une fille publique (une prostituée) ayant insulté un bourgeois et craché au visage du maire soit graciée (libérée avant la fin de sa peine de prison). Mais monsieur Madeleine insiste, et, pour finir de contraindre Javert à lui obéir, lui indique les textes de lois qui l’obligent à suivre les ordres du maire. Bouleversé, Javert s’en va. Fantine, éperdue de reconnaissance et de trouble après tout cela, s’évanouit.
Monsieur Madeleine fait transporter la pauvre fille à l’infirmerie, où une mauvaise fièvre la maintient un bon moment. Souvenez-vous : cela fait déjà longtemps que Fantine ne cesse de tousser ! Elle va probablement mourir et la seule chose qu’elle espère est de revoir sa fille tant aimée, Cosette. Monsieur Madeleine lui promet de la lui ramener. Il envoie alors des courriers aux Thénardier, avec beaucoup d’argent, en leur demandant de ramener Cosette. Mais les aubergistes, comprenant qu’ils peuvent en tirer encore plus d’argent, refusent et réclament des sommes de plus en plus gigantesques. Plusieurs courriers ne viennent pas à bout de leur ténacité (leur entêtement à ne pas céder). Malheureusement, le médecin presse le maire car Fantine n’en a plus que pour quelques jours…
L’affaire Champmathieu : un vrai cas de conscience
Dans le même temps, Javert arrive un matin dans le bureau du maire et lui demande de le démettre de ses fonctions, de le révoquer (de le renvoyer et de lui enlever le droit d’être policier). Il s’accuse d’avoir dénoncé Monsieur le Maire auprès du Procureur, pour être l’ancien forçat Jean Valjean, auteur d’un vol auprès de l’évêque de Digne, Monseigneur Myriel, et d’un autre pour une pièce de 40 sous volée à un jeune Savoyard. On découvre à ce moment-là que Javert a mené une enquête minutieuse (très détaillée), mais qu’il ne tient pas compte du fait que Monseigneur Myriel ait innocenté Jean Valjean…
Or il se trouve, selon Javert, que Monsieur Madeleine ne peut pas être Jean Valjean, puisqu’un voleur de pommes, identifié comme étant le fameux Jean Valjean par des détenus (prisonniers), vient d’être arrêté. Le procès aura lieu le lendemain. Autrement dit, Javert pense qu’il s’est trompé sur le fait que Madeleine et Valjean soient la même personne, regrette sincèrement cette erreur, et demande donc à ne plus pouvoir exercer son métier tellement il se sent coupable, d’autant qu’il a fait acte de dénonciation.
Madeleine alias Valjean refuse de révoquer Javert et lui dit de s’en aller. Il passe une nuit blanche à réfléchir sur la conduite qu’il doit adopter. Faut-il qu’il aille au tribunal et avoue sa véritable identité, afin d’empêcher un innocent d’être condamné à sa place au bagne à perpétuité ? Ou est-ce mieux de ne rien dire et de conserver la vie tranquille et bienfaisante qu’il a bâtie durant tant d’années ? S’il avoue sa véritable identité, c’est lui qui finira sa vie au bagne ! Et il ne pourra donc plus faire le bien autour de lui, ni veiller sur Cosette comme il l’a promis à Fantine qui se meurt… Ce terrible cas de conscience (hésitation entre deux décisions qui auront chacune de graves conséquences morales) le maintient éveillé toute la nuit, et il repense à l’évêque qui a changé sa vie. Que lui conseillerait-il de faire ? A l’aube (quand le soleil se lève), monsieur Madeleine / Jean Valjean a pris sa décision : il ne laissera pas un innocent aller au bagne à sa place.
Il se rend donc au procès et avoue qui il est. Personne ne veut le croire, car c’est un homme respectable, riche, qui n’a rien à voir avec un ancien forçat. Mais il connait les détenus qui disent avoir reconnu Jean Valjean en la personne de Champmathieu. Il est vrai que les deux hommes se ressemblent énormément ! Le vrai Jean Valjean sait tout des témoins détenus, et dévoile des détails sur eux que seul quelqu’un ayant partagé le bagne avec eux peut connaitre. C’est bien lui le vrai Jean Valjean, cela ne fait plus aucun doute. Javert ne s’était pas trompé. Champmathieu est donc innocenté, et libéré. Madeleine / Valjean déclare se tenir à la disposition des forces de police.
Jean Valjean s’enfuit encore une fois
Dès le lendemain, Javert reçoit l’ordre d’arrêter monsieur Madeleine/Jean Valjean, même si des doutes persistent sur son identité d’ancien forçat. Pour le trouver, il se rend à l’infirmerie, où le maire s’est rendu tous les jours depuis que Fantine y séjourne. Javert se montre brutal envers celui qui est devenu son ennemi juré (son pire ennemi), effraye tant Fantine que celle-ci meurt, et emmène l’ancien maire en prison.
Mais Jean Valjean a plus d’un tour dans son sac (est plein de ressources astucieuses) et parvient à s’échapper de prison le soir même. Il revient chez lui pour prendre un peu d’argent et les deux chandeliers de Monseigneur Myriel, qu’il n’avait pas vendus. Il laisse une lettre dans laquelle il déclare laisser le reste de sa fortune aux pauvres de la ville. Javert est déjà là, prêt à l’arrêter de nouveau, mais la servante de monsieur Madeleine, une religieuse en laquelle Javert a toute confiance, ment au policier pour laisser à Jean Valjean le temps de s’échapper. Ce dernier se trouve ainsi de nouveau en cavale ( mot familier qui signifie en fuite et recherché par la police) et se dirige vers Paris, en passant par Montfermeil pour récupérer Cosette chez les Thénardier.
Fin de la première partie.